©Charles Baudry / Outremers360 (archives)
Une majorité des élus du Congrès de Nouvelle-Calédonie souhaiteraient que le prochain référendum sur l’indépendance se tienne le 25 octobre et non le 4 octobre, comme le propose le Premier ministre. L’utilisation du drapeau tricolore durant la campagne référendaire a néanmoins provoqué une levée de bouclier chez les indépendantistes.
En raison de la crise du coronavirus, Édouard Philippe a proposé fin mai de repousser au 4 octobre le deuxième référendum sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, dans le cadre du processus de décolonisation de l’accord de Nouméa (1998), initialement prévu le 6 septembre. Appelés à donner un avis sur le projet de décret « portant convocation des électeurs et organisation de la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie », les élus du Congrès (assemblée législative, ndlr) se sont majoritairement prononcés pour une date plus tardive, au 25 octobre.
Seuls les élus de l’Avenir en Confiance (droite, proche LR) et un élu loyaliste non-inscrit -19 voix sur 54- ont émis un avis favorable à la date proposée par Édouard Philippe. Les indépendantistes du FLNKS ont réitéré leur volonté de disposer de « plus de temps », compte tenu du report du deuxième tour des municipales dont la campagne « va empiéter » sur celle du référendum.
Le groupe Calédonie ensemble (centre droit) s’est dit lui aussi favorable au 25 octobre afin de garantir « une participation au moins aussi importante qu’en 2018 (81%) ». « C’est un des enjeux du scrutin », a déclaré Philippe Dunoyer, élu territorial et député (UDI). Les trois élus de l’Eveil Océanien (parti communautaire wallisien et futunien) ont également plaidé pour la recherche d’une date, autre que celle du 4 octobre, qui puisse faire consensus entre non indépendantistes et indépendantistes.
Le projet de décret du gouvernement a par ailleurs provoqué une levée de bouclier des indépendantistes car, en dérogation au code électoral, il prévoit, dans son article 8, que le drapeau tricolore puisse être utilisé pendant la campagne officielle. L’État a expliqué que ce choix s’est fait « dans un souci d’équité » après des interrogations des autorités de contrôle lors du scrutin de 2018, compte tenu de l’usage par les indépendantistes du drapeau du FLNKS.
« Risques sur le résultat du référendum »
Si les loyalistes s’en sont félicités, le FLNKS a menacé « d’aller au contentieux » sur le résultat du prochain référendum, alors qu’en 2018 cette dérogation n’avait pas été appliquée. « L’État introduit un biais dans le scrutin dont il n’a peut-être pas mesuré la portée », a mis en garde Louis Mapou, chef du groupe UNI-FLNKS. « C’est un acte anti-démocratique, l’État prend position. Ça veut dire que nous, on n’est pas Français », a fustigé Jacques Lallié (UC-FLNKS), président de la province des îles Loyauté, au cours d’un débat houleux de plusieurs heures.
Arguant qu’ils défendent un projet d’indépendance en partenariat avec la France, les indépendantistes ont affirmé ne pas vouloir de « rupture » avec elle, rappelant qu’un processus « négocié » (de décolonisation) était en cours. « Il faut arrêter de faire croire qu’on peut être indépendant sans sortir de la France », a déclaré Sonia Backès, élue de la coalition non indépendantiste l’Avenir en confiance, et présidente de la province Sud. « Le projet indépendantiste veut qu’une communauté prenne le dessus sur les autres », a-t-elle argué.
« Je déplore que les conditions entre 2018 et 2020 changent. La responsabilité est celle des deux camps, et de l’État. Ils devront assumer ainsi les éventuels contentieux suite au résultat », a commenté Milakulo Tukumuli de l’Éveil océanien. « Ça provoque, et ça provoquera certainement, des risques sur le résultat du référendum. S’il y a un contentieux sur le décret, il y aura certainement un contentieux sur le résultat du référendum », estime l’élu non indépendantiste Philippe Dunoyer.
Le premier référendum, remporté par les non indépendantistes (56,7%), a eu lieu le 4 novembre 2018. En vertu des textes réglementaires, la date butoir pour le deuxième est le 3 novembre 2020 tandis qu’un troisième scrutin peut encore avoir lieu d’ici 2022. Le projet de décret du Premier ministre pour le second référendum a finalement été adopté mais mentionnant les divergences entre indépendantistes et non indépendantistes sur la date et l’utilisation du drapeau tricolore.
Avec AFP.