©Outremers360
En 1959, le député sénateur de Polynésie, Pouvana’a a O’opa était condamné à huit ans de prison et à 15 ans d’exil pour de graves accusations : d’avoir incité ses partisans à brûler la ville de Papeete et de détenir des armes et des munitions chez lui sans autorisation.
De retour à Tahiti en novembre 1968, après finalement 8 années d’exil, Pouvana’a a O’opa demandait la révision de son procès et exhortait les journalistes à l’aider (extrait d’un documentaire de l’ICA), mais la chape de plomb qui pesait sur la libre expression en Polynésie pendant les années du Centre d’Expérimentation du Pacifique (CEP) avait interdit toute tentative de recherche de vérité. Le Metua mourrait en 1977 sans avoir été réhabilité. Sa famille engageait une première tentative de révision en 1988, mais la Cour de cassation l’avait rejetée. Il faudra attendre encore quelques années et l’engagement de quelques intellectuels pour que les lignes bougent.
L’historien Jean-Marc Regnault sortait un livre en 2003, Pouvana’a a O’opa, victime de la raison d’État : les documents parlent, qui apportait une lecture nouvelle à l’affaire : dans l’optique de préparer la Polynésie à recevoir le Centre d’Expérimentation du Pacifique, le Metua résolument anti essais-nucléaires devenait gênant.
En 2012, un documentaire réalisé par Marie-Hélène Villierme, L’élu du peuple : Pouvanaa te Metua, venait soutenir la thèse d’un complot monté contre Pouvana’a a O’opa. Présenté et primé au Festival du Film Océanien (FIFO), ce documentaire était vu par plus 4 000 Polynésiens en une semaine. En avril 2012, il était programmé durant quelque semaine dans une salle de cinéma de Tahiti. L’année suivante, il était projeté à l’Élysée dans le cercle du Président François Hollande. Les médias prenaient le relais, des magazines comme le Dixit et Tahiti Pacifique, mais aussi les télévisions qui ont beaucoup aidé à la pédagogie de l’histoire auprès des jeunes générations de Polynésiens nés après les « années nucléaires ».
En 2014, Christiane Taubira, alors garde des Sceaux, lance une nouvelle procédure de révision du procès, répondant ainsi à une demande de l’Assemblée de la Polynésie française, qui avait voté à l’unanimité une motion en ce sens. En 2016, Jean-Marc Regnault écrit en collaboration avec la magistrate Catherine Vannier un livre, Le Metua et le Général, un combat inégal, qui apporte de nouvelles preuves du complot.
Le 25 octobre 2018, Pouvana’a a O’opa était enfin innocenté par la Chambre criminelle de la Cour de Cassation qui estime qu’il « existe des faits nouveaux et éléments inconnus de la juridiction lors du procès de nature à créer un doute sur la culpabilité ». La formulation de la Chambre reste très mesurée, tant ces éléments nouveaux apportent la preuve de son innocence.
Marie-Hélène Villierme était aux côtés des enfants de Sandro Stephenson, arrière-petit-fils du Metua, lors de cette audience historique. En effet, c’est en préparant son film qu’elle s’est rapprochée de la famille, de Lola Oopa d’abord, qui l’a guidée dans son travail. Puis c’est auprès de Sandro et de sa famille, qu’elle a suivi de près le long et patient processus qui a mené à la réhabilitation du Metua.
Dominique Morvan, Dixit Magazine.