Pacifique : L’ONU inquiète de fuites radioactives d’un dôme sur un atoll

Pacifique : L’ONU inquiète de fuites radioactives d’un dôme sur un atoll

Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a fait état jeudi d’inquiétudes quant à de possibles fuites de matériaux radioactifs d’un cratère coiffé d’un dôme de béton sur un îlot de l’archipel des Marshall, qui renferme les résidus de 12 années d’essais nucléaires américains dans le Pacifique.

Dans un discours devant des étudiants des Fidji, Antonio Guterres a présenté la structure construite sur l’île de Runit, qui appartient à l’atoll d’Enewetak, comme un « cercueil » hérité de la Guerre froide. « Le Pacifique a été une victime par le passé, comme nous le savons tous », a rappelé le patron de l’ONU. Entre 1946 et 1996, les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne ont effectué des centaines d’essais nucléaires sur des îles du Pacifique.

Dans le Pacifique central, les Américains ont réalisé plus de 100 essais, dont 67 entre 1946 et 1958 sur les atolls de Bikini et d’Enewetak, dans les Marshall, situées à mi-chemin entre l’Australie et l’Etat américain d’Hawaï. Parmi ces tests, figure celui de la bombe à hydrogène « Bravo » en 1954, la bombe H la plus puissante jamais détonée par les Etats-Unis, d’une puissance 1 000 fois supérieure à celle larguée sur Hiroshima. En Polynésie française, la France a réalisé 193 essais aériens et souterrains de 1966 à 1996, sur les atolls de Moruroa et Fangataufa, dans l’archipel des Gambier.

Antonio Guterres, dont la tournée dans le Pacifique Sud est principalement consacrée au réchauffement climatique, a indiqué que les insulaires de la région avaient besoin d’aide pour faire face aux conséquences des essais nucléaires. « Ces conséquences ont été dramatiques, pour ce qui est de la santé, de l’empoisonnement de l’eau dans certais endroits », a-t-il souligné. « J’étais avec la présidente des Îles Marshall (Hilda Heine) qui est très inquiète du risque de fuite de matières radioactives qui sont contenues dans une espèce de cercueil dans la zone », a expliqué le chef de l’ONU.

Ce cercueil est en fait le cratère de l’explosion de la bombe nucléaire Cactus sur l’île de Runit en mai 1958 dans lequel furent enfouis des années plus tard les déchets contaminés de dizaines d’autres tests. Il fut recouvert en 1979 d’un dôme de béton de 45 centimètres d’épaisseur. Cette solution de stockage ne devait être initialement que temporaire. Et pour des raisons de coûts, le fond du cratère ne fut pas isolé avec une couche de béton, d’où les craintes de lessivage des matières radioactives.

Après quatre décennies d’exposition aux éléments, des fissures sont également apparues sur le dôme lui-même. La structure est en outre menacée par la montée des eaux provoquée par le réchauffement climatique. Antonio Guterres n’a pas offert de solution immédiate au problème du dôme de lîle Runit, mais il a estimé qu’« il y a beaucoup à faire à la suite des explosions qui ont eu lieu en Polynésie française et dans les îles Marshall », évoquant la question des compensations. En 2010, le gouvernement de Nicolas Sarkozy a fait adopter une première loi d’indemnisation pour les victimes des essais français dans le Pacifique. Modifiée en 2017 suite à la loi EROM, elle est encore jugée insuffisante par les associations anti-nucléaires.

Avec AFP