Alfred Marie-Jeanne rencontre ce lundi 25 janvier à Paris, George Pau-Langevin, « à sa demande”, précise le président de l’exécutif de la CTM (Collectivité Territoriale de Martinique). Il envisage essentiellement d’écouter la ministre des Outre-Mer, qui comme beaucoup d’observateurs locaux et parisiens, ne s’attendait peut-être pas à sa victoire à l’issue des premières élections territoriales martiniquaises.
« Il ne faut pas confondre “coco et zabricot »
Si en Corse, les nationalistes au pouvoir, considèrent la France comme « un pays ami”, Alfred Marie-Jeanne, pourtant président du Mouvement Indépendantiste Martiniquais, n’est pas du tout dans le même état d’esprit. « Il ne faut pas confondre “coco et zabricot”, les dirigeants de la Collectivité Corse ont eu le courage d’affirmer qu’ils revendiquent soit l’autonomie, soit l’indépendance pour leur île. Pour ma part, je n’ai pas été élu pour remettre en cause le système actuel ». Le président de l’exécutif martiniquais, précise que la création par la loi, d’une nouvelle collectivité qui reprend les compétences de l’ex Conseil Général et de l’ex Conseil Régional de Martinique, constitue une avancée, qui semble lui convenir. « J’ai été élu pour faire fonctionner la Collectivité Territoriale de Martinique, le plus utilement ».
La droite et les indépendantistes se répartissent le pouvoir
Les élus martiniquais procèdent depuis début janvier aux répartitions des fonctions au sein de la Collectivité Territoriale et des organismes proches ou extérieurs. Un partage très rationnel entre indépendantistes, autonomistes et la droite martiniquaise qui rebondit après plusieurs années d’audience en berne. “Une droite progressiste”, confie le camp indépendantiste. À la question de savoir si l’attelage qu’il dirige à la tête de la CTM est aussi simple qu’il l’imaginait, Alfred Marie-Jeanne réfute l’expression d’attelage et parle d’un contrat de gestion respectueux des femmes et des hommes de cette coalition. « Il n’y a pas celui qui tient les rênes et les autres qui obéissent”. La fusion des listes de Yan Monplaisir (Droite) et des partisans d’Alfred Marie-Jeane entre les deux tours des territoriales est le fruit de réflexions antérieures à l’élection, révèle le chef de l’exécutif martiniquais. « Nous avons mis en commun ce qui nous rassemble notamment pour lutter contre la corruption d’où qu’elle vienne… »
Assainir les finances
Avec un taux de chômage qui oscille entre 19 et 20%, des prix toujours encore trop élevés, la faiblesse de l’aide à l’entreprise, une fuite des cerveaux, le vieillissement de la population, les défis à relever sont considérables en Martinique. “Tout est prioritaire mais il convient d’abord d’assainir les finances”. Alfred Marie-Jeanne envisage de dévoiler publiquement la réalité des finances après un audit, semble-t-il déjà commandé. Histoire de mettre davantage en exergue la faillite supposée de l’ancienne majorité sous l’influence de Serge Letchimy et du Parti Progressiste Martiniquais. Autre priorité, la poursuite de l’intégration de la Martinique dans son environnement de la Caraibe. La procédure a déjà bien commencé sous l’égide de l’ancienne majorité. Serge Letchimy, ancien président du conseil régional de Martinique et Roosevelt Skerrit, premier ministre de la Dominique, président de l’OECS (Organisation des États de la Caraïbe de l’ESt) ont signé l’adhésion de la Martinique à l’OECS en février 2015. La formation professionnelle est aussi l’un des axes forts d’Alfred Marie-Jeanne dans un pays où trop de jeunes sortent du système scolaire sans formation et donc sans avenir.
“Ils essaient de me rendre inéligible”
Le président de l’exécutif martiniquais a pris à témoin les téléspectateurs dimanche 17 janvier 2016 sur Martinique 1ère. “En haut lieu, on essaie de me rendre ineligible”, a-t-il dit. Alfred Marie-Jeanne fait référence à une éventuelle comparution au tribunal correctionnel début mars 2016, pour prise illégale d’intérêt dans l’affaire Green Parrot, concernant la construction d’une école à la Dominique, avec les fonds de la coopération régionale.“J’attends fermement, calmement cette échéance”. Il dénonce au passage, sans les nommer, “ceux qui cherchent à manipuler le gouvernement …Ils ne peuvent pas faire annuler l’élection, sinon nous gagnerons de manière encore plus écrasante, alors ils essaient de me rendre inéligible”, accuse-t-il.
Pas candidat aux législatives de 2017
En attendant cet éventuel rendez-vous judiciaire, le président de l’exécutif martiniquais, qui aura 80 ans le 15 novembre prochain, ne sera pas candidat à un quatrième mandat consécutif à l’Assemblée Nationale (élu depuis 1997). Il est vrai que sa carte de visite politique est impressionnante : conseiller général, conseiller régional, maire, député, président du conseil régional, et aujourd’hui président du conseil exécutif de la CTM…
Par Joseph NODIN et Luc LAVENTURE, en partenariat avec martiniquela1ere.fr