Irma : Dans une lettre au Président de la République, le député Serge Letchimy appelle à « défaire toute dépendance »

Irma : Dans une lettre au Président de la République, le député Serge Letchimy appelle à « défaire toute dépendance »

Serge Letchimy, ce lundi 16 octobre, au Ministère des Outre-mer ©Outremers360

Dans une lettre adressée au Président de la République et publiée sur le site Mediapart, le député martiniquais Serge Letchimy tire les leçons du cyclone dévastateur Irma. « Cette bête cyclonique nous démontre (s’il en était besoin) combien nulle expertise ne saurait convenablement administrer quoi que ce soit à 7000 km de distance », écrit le député. Serge Letchimy appelle ainsi à « défaire toute dépendance » et à une « République Unie, celle qui fait alliance avec sa propre diversité, qui retrouve les histoires qui habitent son Histoire, les mémoires qui tapissent sa Mémoire, qui s’élargit et se grandit comme cela ». Une prise de position qui s’inscrit à l’aube des Assises des Outre-mer. 

C’est directement au Président de la République Emmanuel Macron que s’adresse le député de la Martinique Serge Letchimy (Nouvelle Gauche). « Les cyclones ne font pas que révéler des transformations climatiques », écrit le député, « ils rappellent à nos lucidités des catastrophes structurelles bien moins spectaculaires mais tout aussi terribles ». « Dans nos pays dits « d’Outre-mer », il y a un désastre ordinaire, devenu invisible, et qui prospère dans des syndromes d’origine coloniale. Pour ce qui est de la Martinique : mal-modernisation socio-économique, amas de mécanismes grippés, hyperconsommation, chômage consubstantiel, paupérisation économique, sociale et culturelle galopante, génocide démographique, intentions exogènes qui règnent sans racines car venues d’en haut et venues de trop loin ».

Bien avant Irma, Saint-Martin souffrait déjà de retards structurels et d'inégalités sociales Serge Letchimy, ce lundi 16 octobre, au Ministère des Outre-mer ©AFP

Bien avant Irma, Saint-Martin souffrait déjà de retards structurels et d’inégalités sociales Serge Letchimy, ce lundi 16 octobre, au Ministère des Outre-mer ©AFP

Observant des « inégalités » d’une « rare acuité », Serge Letchimy souligne « la précarité sociale » qui « déborde le supportable et la perte démographique prend des allures de bombe : dans les années qui viennent, les plus de 60 ans constitueront près de 40 % de la population ». « L’exode des jeunes se nourrit d’une dévitalisation diffuse, d’une dépendance fossilisée, d’un assistanat installé en réflexe », poursuit-il. Serge Letchimy plaide également pour la prise en compte d’un « contexte global ». « Comment penser Saint-Martin ou Saint-Barthélemy en dehors d’une vision caribéenne globale ? Comment agir sans restituer aux acteurs de terrain, élus et habitants, leur capacité à prendre en main une adaptation véritable à leur contexte singulier et à celui du monde ? Comment agir vraiment sans soupeser des pesanteurs historiques, des engrenages socio-économiques, et sans considérer les héritages coloniaux dont aucune approche sérieuse ne saurait faire l’économie ? », s’interroge-t-il.

Comme de nombreux responsables politiques antillais, le Martiniquais Serge Letchimy plaide pour ©AFP

Comme de nombreux responsables politiques antillais, le Martiniquais Serge Letchimy plaide pour une reconstruction avec « une vision caribéenne globale ©AFP

Plus loin, Serge Letchimy, qui revendique sa « fidélité politique pour la notion d’autonomie », défend la conception « d’une alternative rigoureuse » fondée « sur trois considérations fondamentales » : « assainir le vocabulaire » (outre-mer, métropole, DOM-TOM), « responsabiliser », car selon le député « les hommes, les peuples, les territoires, ne se montrent parfaitement résilients que lorsqu’ils disposent de la responsabilité d’eux-mêmes et des capacités de penser et d’agir qui leur sont nécessaires », et « défaire toute dépendance », car « la situation de dépendance structurelle économique sociale, culturelle, et finalement mentale, nous démobilise insidieusement. Elle nous éloigne d’une aptitude à la résilience, aux dépassements, aux actions signifiantes de notre existence dans les dangers du Monde ».