L’écart se resserre entre indépendantistes et loyalistes : 46% contre 53%.
Ce qui fait dire à Jean Tenahe Faatau, le journaliste d’Outremers360 couvrant l’actualité calédonienne que si le non l’a finalement emporté, il s’agit d’une « défaite victorieuse » pour les indépendantistes. Le constat est le même pour un élu local, non indépendantiste, mais plus implacable : « la Nouvelle-Calédonie française sort fragilisée de ce 2ème référendum » et « les indépendantistes ont le vent dans les voiles ».
Comme en 2018, mais plus patent encore, puisque le oui a fait cette fois un bond de 3 points.
Le taux de participation est historique : près de 86%. De quoi faire pâlir de jalousie les élus de l’Hexagone. Encore qu’on puisse se demander où sont passés les 10.000 calédoniens qui ne se sont pas déplacés pour s’exprimer dans un scrutin où les places sont si chères avant d’y être admis.
Ce rapport de forces entre loyalistes et indépendantistes confirme que la situation est figée. De ce point de vue, le paysage électoral n’a pas significativement changé depuis les années 80.
Malgré l’ampleur des flux financiers de la France hexagonale vers la Nouvelle-Calédonie et malgré l’extrême raffinement des créations institutionnelles mises en œuvre sur le Caillou, comme est surnommée familièrement la Nouvelle-Calédonie, cette situation figée traduit, 30 ans après, les limites des Accords de Matignon, signés entre Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur en 1988 sous l’œil bienveillant de Michel Rocard.
Un accord relifté 10 ans après : les Accords de Nouméa ont organisé le transfert de compétences considérables de la France vers la Nouvelle-Calédonie, au point de lui conférer, via notamment la création des Provinces – dont 2 des 3 sont gérées par les Indépendantistes – des niveaux d’autonomie jusqu’ici inconnus dans une collectivité publique française.
Aujourd’hui, après ces deux referendums de 2018 et de 2020, cette construction méticuleuse qui devait faire naître un destin commun et un avenir fraternel entre les communautés calédoniennes aboutit en réalité à un pays paralysé, pire, à un pays au bord de la fracture, à une dangereuse accélération des antagonismes.
Que faire maintenant ?
Le Président de la République a, hier, me semble-t-il, ouvert une piste. J’ai cru y voir l’esquisse d’une ouverture. Il ne reste pas bloqué sur ce fameux troisième referendum que réclament les tenants du oui, comme une obligation qui découlerait d’une lecture intégriste des Accords de Nouméa.
Dans la foulée de ses prédécesseurs qui depuis 32 ans, se coltinent avec le dossier calédonien, mais cette fois poussé par une nouvelle urgence, le Président de la République pose les jalons d’une négociation à trois : l’État, les indépendantistes et les loyalistes.
Les camps se figent, les opinions se crispent. : le Président de la République a bien fait de relire les Accords qui le prévoyaient et il ouvre un nouveau cycle.
La question essentielle est toujours la même : comment faire vivre, comment faire travailler ensemble les communautés, comment les rassurer et réanimer l’économie en panne, les péréquations sociales tétanisées et les investisseurs aux abonnés absents ? Et accessoirement tuer dans l’œuf la tentation de la violence dont on a ici la mémoire vive.
La jurisprudence de l’équidistance attentiste de l’État doit finir. La Nation française a la capacité de s’adapter aux situations tendues et souvent complexes. De Michel Rocard à Manuel Valls et Édouard Philippe, en passant par Lionel Jospin, les Premiers ministres ont mouillé la chemise sur l’affaire calédonienne.
En ces périodes difficiles pour les Outre-mer, il faut donner un signe.
Vite !
Clair !
Le président Macron ouvre une troisième voie avec cette négociation tripartite. Le ministre des Outre-mer doit saisir cette opportunité, l’occasion d’écrire l’Histoire.
Donner un signe fort. Débloquer la situation en allant sur place. Il a dit ce matin sur France Inter qu’il n’excluait pas d’y aller.
NON ! Quarantaine ou pas, il doit y aller.
Sebastien Lecornu est jeune. Il sait ce qu’est un « territoire ». Il a de l’intuition. Le créneau est à prendre maintenant ! Il a la capacité de faire baisser la tension qui monte, en renversant lui-même la table au profit des calédoniens qui, en l’état actuel des choses, à bout de concessions mutuelles, ne sont pas disposés à céder la moindre parcelle de terrain.
C’est l’occasion pour lui de donner un signe fort aux Outre-mer et de montrer qu’il n’a pas peur d’être l’arbitre du moment.
Il peut, par son volontarisme et avec le soutien du Président Macron, ouvrir une page d’espérance en Nouvelle-Calédonie.