Après une dizaine de jours de négociations, Laurent Fabius a présenté samedi 12 décembre, le projet d’accord universel pour lutter contre le dérèglement climatique, en présence du président François Hollande et du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon. Il doit maintenant être analysé et accepté. Donc ne vendons pas la peau de l’ours…
On peut dire « qu’ils ont mouillé la chemise ». Négociateurs, diplomates, chefs d’état, société civile ont fait un travail extraordinaire renversant même dans les dernières heures de la nuit les inquiétudes qui nous minaient hier soir. L’accord entre François Hollande et Laurent Fabius dans le ton adopté, signe une communication bien huilée. « Nous vous remercions de cet effort collectif » et « vous êtes sur la dernière marche, il n’y a pas de sursis possible..Le 12 Décembre peut être une grande date pour l’humanité… La France meurtrie vous demande…L’histoire est là , l’histoire avance…Le monde retient son souffle » .Que retenir pour l’instant ? D’abord l’ambition de l’accord: « universel, contraignant et différencié ». Universel, parce que 196 ratifications sont attendues. « Vous êtes le monde », a dit le Président Hollande. L’accord de Paris serait le premier engagement planétaire. Le mot d’historique n’est donc pas trop fort. Le protocole de Kyoto ( où il y avait moins de monde) avait été signé entre pays riches. La dimension universelle de l’accord réconcilie également avec l’ONU et avec le multilatéralisme. Juridiquement contraignant: l’expression est fondamentale. Pendant les quinze jours de négociations, elle est restée en suspend. C’est elle qui engage les états devant leur peuple et au respect de leurs engagements. D’autant que la demande de révision des engagements tous les cinq ans, malgré l’opposition de l’Inde, obligera à mesurer les efforts, à les renouveler et à les accroitre. Elle signe les objectifs permet aux entreprises et aux collectivités territoriales de travailler sur le long terme. Nous sommes résolument entré dans une ère nouvelle , un « momentum, une conjonction de planètes ». Enfin l’accord est différencié. Cette notion qui après Kyoto avait été réclamé par les pays en développement pour rester fidèle à la Convention climat de 1992 a conduit les pays du Nord à reconnaitre leurs responsabilités. Ils devront donc assurer davantage et aider les pays touchés. La question de la différenciation a été très controversée pendant les débats, car le monde change, les équilibres économiques se modifient, et les pays riches auraient aimé voir les émergents prendre leur part de fardeau. La Chine par son engagement a joué un rôle très important. Pour l’Australie, par ailleurs gros producteur de charbon, hors de question de voir seuls les pays riches assumer ses efforts. « On a une position très ferme sur la question. L’Australie estime que tous les pays doivent prendre des mesures, qu’il faut des règles équitables et c’est ce que nous demandons », a indiqué la ministre des Affaires étrangères australienne, citée par Nouvelle-Calédonie 1ère. Enfin, et c’est l’inattendu du dernier round de débat, du plafond des 2° nous sommes revenus à celui de 1°5 , reconnaissant ainsi la demande des petites îles déjà fortement menacées. Un exploit diplomatique préparé par une année de voyages présidentiels sur les terres océaniques.
Une victoire diplomatique
Quelque soit l’issue de la COP 21, la victoire de ce matin, c’est-à-dire l’aboutissement à un texte d’abord, et à CE texte ensuite, est sans contexte une réussite diplomatique. La diplomatie française a bonne réputation; mais la manière dont a été gérée cette COP dans une telle période de crise ne peut qu’entrainer le respect. Ce que le secrétaire national de l’ONU Ban ki Moon n’a pas manqué de souligner. Pour les commentateurs, l’émotion de Laurent Fabius après tout est un bon signe. « Il est habité! » réagit le navigateur Jean Louis Etienne. « C’est encourageant car toute l’année il va être aux manettes ».
La déception des ONG
Seul dans son discours François Hollande a mentionné le prix carbone. Apparemment le texte n’en parle pas. Or c’est une des conditions sine qua non à tenir financièrement les paris annoncés. Rien non plus sur la nécessité de laisser les fossiles là où ils sont. Un signe cependant, les pays producteurs seraient aidés à entrer dans la diversification.
Par Dominique Martin Ferrari, Outremers Métamorphoses.