©Grand port maritime de Fort-de-France en Martinique
Avant la fin de l’année, le nouveau Secrétaire général de la mer, Denis Robin, aura pour mission de mettre en œuvre la révision de la stratégie portuaire nationale dans laquelle les Outre-mer seront intégrés. Pour les Grands ports maritimes de Guadeloupe, Martinique et Guyane, il s’agira de créer un document de coordination dans un contexte de bouleversement du trafic maritime dans la région Atlantique-Caraïbes. Interview avec Emmanuel Berthier, directeur géneral des Outre-mer au Ministère des Outre-mer qui préside le Conseil de coordination inter- portuaire Antilles Guyane (CCIAG).
C’est un travail de longue haleine qui a mené les Grands ports maritimes ultramarins vers cette « année charnière » de 2019. Tout a commencé en 2012, avec la réforme portuaire Outre-mer, déclinaison de la réforme hexagonale, qui en 2014, a abouti sur la création des Grands ports maritimes à La Réunion, en Martinique, en Guadeloupe et en Guyane. En 2016 a également eu lieu la première réunion du premier conseil de coordination interportuaire Antilles-Guyane. Trois ans plus tard, en février 2019, ce conseil se réunit une nouvelle fois et « à partir des réflexions conduites en 2016 (…), pour aller plus et vite plus loin en se fondant sur les plans stratégiques en cours d’écriture », le préfet Emmanuel Berthier, Directeur général des Outre-mer, fixe comme objectif « la création d’un document de coordination ».
Ce document, pierre angulaire du développement portuaire des Antilles-Guyane, doit être adopté avant la fin 2019 dans le cadre d’un nouveau conseil de coordination interportuaire qui pourrait, cette fois-ci, avoir lieu en Guyane. Avant cela, une première version doit être présentée et amendée par les conseils de surveillance des Grands ports maritimes de Guadeloupe, Martinique et Guyane. « En novembre ou décembre, on aura une stratégie nationale portuaire et trois ports qui auront défini leur plan stratégique et les Antilles-Guyane auront un document de coordination », assure le préfet Emmanuel Berthier. S’il faudra être patient pour connaitre les grandes lignes de ce plan stratégique et du document de coordination, le Directeur général des Outre-mer esquisse les grands changements du trafic maritime dans la région Atlantique-Caraïbes qui seront au coeur de ces nouvelles stratégies.
L’expansion de la croisière et du transbordement
« On a eu un phénomène majeur dans l’océan Atlantique : c’est l’élargissement des écluses de Panama avec une réorganisation progressive des trafics et des acteurs qui recomposent leurs stratégies et points d’appui », explique Emmanuel Berthier. « La stratégie du gouvernement français est de dire que les ports d’Antilles-Guyane travaillant ensemble vont créer de la valeur ajoutée ». Cette valeur ajoutée, les Grands ports d’Antilles-Guyane la puisent dans leurs spécificités. « Globalement, les ports sont les portes d’entrées quasi-exclusives des marchandises : 95 à 99%. Il y a un trafic lié à la population : celle-ci est en développement en Guyane, mais en baisse en Martinique et en Guadeloupe. Aux Antilles, on a un trafic lié aux hydrocarbures, et au mieux mature ». En revanche, les ports antillais affichent deux segments en pleine expansion : la croisière et le transbordement de conteneurs.
Le transbordement de conteneurs est une activité liée au développement important de ce mode de transport, « qui va connaitre des modifications considérables avec l’ouverture du canal de Panama ». « Ce qu’on constate en Martinique et en Guadeloupe, c’est à la fois un développement très important de la croisière et un développement important substantiel du transbordement. Le transbordement est une petite partie du trafic de conteneurs mais c’est une partie essentielle pour nous parce que cela nous permet de continuer de jouer sur les routes maritimes principales et de créer de l’activité pour nos ports », assure encore le préfet Emmanuel Berthier. S’il n’est pas question pour les Grands ports maritimes de Guadeloupe et Martinique de rivaliser avec des structures portuaires conséquentes telles que Kingston, il s’agira pour ces ports ultramarins de se positionner de façon stratégique sur les routes maritimes et d’en tirer tous les bénéfices.
Cela implique notamment de considérer les ports comme des « acteurs économiques, environnementaux qui doivent vivre dans des environnements régionaux » qui peuvent à terme aboutir à de véritables villes ports. Il s’agit également, et pour développer le transbordement, de disposer du foncier aménagé, ce qui, en Outre-mer, est une autre problématique prégnante du développement économique. Quoiqu’il en soit, le Préfet Emmanuel Berthier, qui par ses fonctions préside le conseil de coordination interportuaire, l’assure : « 2019 est une année charnière pour l’avenir des ports ultramarins, on a balisé le terrain jusqu’à la fin de l’année ».
Forme juridique du Grand port maritime
Créé à l’issue de la réforme portuaire Outre-mer de 2012, les Grands ports maritimes sont des établissements publics de l’État qui sont dirigés par un Conseil de surveillance et un directoire. Le Directeur général du Port est aussi le président du directoire. La gouvernance voulue par la réforme portuaire outre-mer a été remise en place en 2018 pour cinq ans. Les conseils de surveillance des Grands ports maritimes de Guadeloupe, de Guyane et de Martinique prennent notamment part aux réunions du conseil de coordination interportuaire de leur région.