Planète : L’association Globice va suivre les baleines de La Réunion vers l’Antarctique

Planète : L’association Globice va suivre les baleines de La Réunion vers l’Antarctique

©Isabelle Preud’homme

Du 30 août au 15 septembre 2019, Globice Réunion déploiera l’opération MIROMEN II (Migration Routes of Megaptera novaeangliae), seconde campagne scientifique de suivi satellitaire des baleines à bosse de passage le long des côtes de La Réunion. 

Cette campagne scientifique est financée par l’Europe, la Région Réunion et la DEAL Réunion dans le cadre du programme opérationnel FEDER 2014-2020 et s’inscrit dans le cadre d’un programme d’action du Pôle Mer de La Réunion visant l’amélioration des connaissances du milieu marin

Ce projet fait suite au programme MIROMEN I mis en œuvre par Globice en août 2013, qui avait permis des découvertes majeures grâce au suivi des individus équipés, et notamment l’identification d’un haut niveau de connexion entre La Réunion et Madagascar mettant en exergue l’important rôle connexe que jouent ces deux îles au niveau du cycle biologique des animaux. Le programme avait également permis la découverte de nouveaux sites de reproduction et de l’utilisation des monts sous-marins par les baleines à bosse.

Obtenir une vision globale des mouvements des baleines à bosse sur l’ensemble de leur cycle migratoire

MIROMEN II s’inscrit dans la continuité et en complémentarité du projet MIROMEN I. Il vise à équiper quinze baleines à bosse de balises Argos afin d’identifier leurs trajets retours entre l’océan Indien et les sites de nourrissage en Antarctique. L’enjeu est d’obtenir une vision globale des mouvements des baleines à bosse sur l’ensemble de leur cycle migratoire, enjeu primordial pour protéger l’espèce et mieux comprendre les facteurs pouvant expliquer les variations inter-annuelles de fréquentation des baleines à La Réunion.

Le temps d’émission des balises utilisées pour MIROMEN I n’avait pas été suffisamment long pour pouvoir tracer ces trajets retours. Les balises utilisées lors du programme MIROMEN II seront paramétrées de telle sorte qu’elles puissent émettre plus durablement. Elles seront en outre équipées de profondimètres permettant de mieux caractériser les changements de comportements, notamment des profils de plongée, en vue d’identifier les sites d’alimentation.

A l’instar de MIROMEN I, la pose des balises sur MIROMEN II s’accompagnera de prélèvements cutanés afin de déterminer le sexe de l’animal et procéder à son identification génétique en parallèle aux données spatiales. Par la comparaison de ces échantillons génétiques à d’autres échantillons prélevés ailleurs dans l’océan Indien, il sera possible de mieux comprendre de quelle manière les différentes populations de baleines à bosse échangent entre elles.

Une opération sensible qui mobilise expertises et outils de pointe

Le programme MIROMEN II vise le déploiement de balises Argos sur quinze individus adultes, afin de suivre leurs différents mouvements migratoires par transmission satellite. La pose des balises est un procédé très technique qui requiert l’intervention de spécialistes expérimentés. C’est pourquoi Amy Kennedy, biologiste américaine du National Marine Mammals Laboratory de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration) et experte en pose de balises satellites sur les baleines à bosse, fera partie de l’équipe de terrain. Elle aura la charge d’implanter les balises Argos sur les individus au moyen d’un équipement de type lance-amarre spécialement conçu par la NOAA à cette fin.

Les méthodes comme le matériel qui seront utilisés ont été éprouvés par de nombreux programmes similaires à l’échelle de la planète. Des suivis des individus équipés sont réalisés par la NOAA pour améliorer en continu le matériel et réduire autant que possible l’impact sur les animaux. D’après les résultats collectés jusqu’à présent, si l’ancrage des balises reste invasif, son impact sur les baleines à bosse est assez faible et n’implique pas d’effet à long terme sur les individus (reproduction, survie, etc…).

Le système d’attache pénètre dans le lard épais de l’animal, juste en dessous de la nageoire dorsale, puis la balise émet ensuite sa position à chaque remontée en surface de la baleine. Au bout de quelques semaines ou mois, la baleine finit par “rejeter” l’équipement (à la manière dont nous pouvons rejeter des corps étrangers, comme des échardes). Il arrive parfois que les balises se détachent prématurément lors d’interactions entre les animaux, par exemple au cours de scènes d’accouplement ou de compétition, lorsque les baleines se frottent l’une contre l’autre.

La baleine à bosse étant une espèce protégée, la mise en œuvre de MIROMEN II fait l’objet d’une dérogation du Ministère de la transition écologique et d’une autorisation du Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation basée sur l’évaluation favorable de l’opération par le comité d’éthique animale.

Des partenaires aguerris

MIROMEN II est un programme scientifique conçu, porté et coordonné par Globice Réunion qui s’appuie également sur les ressources de partenaires internationaux et locaux clés dans ce type de projet :

• L’agence américaine National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), qui apporte son expertise pour le choix et la programmation des balises, fournit le matériel adapté à la pose de ces dernières et apporte son expertise sur le terrain pour le déploiement ;

• La Brigade Nature Océan Indien (BNOI – la Réunion), garante du respect des protocoles validés par le Ministère, et qui apporte un soutien technique et logistique à la mission, en mettant à disposition un moyen à la mer et son expertise pour l’approche des animaux et la prise de prélèvements cutanés.

De nombreuses retombées potentielles

Tout comme le programme MIROMEN I, MIROMEN II s’intègre dans une dynamique régionale de suivi satellitaire des mouvements migratoires des baleines à bosse de l’Océan Indien occidental. Les opérations de déploiement de balises Argos (Madagascar en 2012-2014 par la WCS et le CNPS ; Mayotte et Comores en 2011-2013 par Megaptera ; La Réunion en 2013 par Globice ; Kenya par la WCS en 2019) font l’objet de travaux de recherches partagés, coordonnés dans le cadre du Consortium IndoCet actuellement animé par Globice.

Les retombées de MIROMEN II sont potentiellement nombreuses et synergiques avec les programmes scientifiques conduits par Globice pour approfondir la connaissance et la préservation des baleines à bosse: apport de données sur le cycle biologique de l’espèce ; alimentation des réflexions générales menées par la commission baleinière internationale (CBI) sur la gestion du Sanctuaire de l’océan Indien ; identification des zones de nourrissage dans l’Antarctique ; mise en lumière des secteurs qu’il est essentiel de préserver dans l’intérêt de l’espèce, à l’échelle locale et régionale ; comparaison régionale des données similaires obtenues dans les pays voisins, etc.

Les résultats seront valorisés par des publications scientifiques et la proposition de documents de travail aux conférences internationales pertinentes. Au-delà de ces objectifs de valorisation scientifique, les résultats serviront à la sensibilisation de la population réunionnaise et seront largement valorisés sur l’île par l’organisation de conférences et d’interventions scolaires. A compter du marquage du premier individu, le grand public pourra à suivre en temps réel le trajet migratoire des baleines à bosse sur le site de Globice Réunion.