Biodiversité : Des satellites pour surveiller la progression de la déforestation en Amazonie

Biodiversité : Des satellites pour surveiller la progression de la déforestation en Amazonie

© AFP/Nelson Almeida

La densité de la forêt amazonienne rend difficile le travail de surveillance pour contrer les opérations de déforestation illégale au Brésil, mais des satellites veillent depuis le ciel.

Depuis trente ans, des scientifiques brésiliens s’appuient sur les images des satellites tournant autour de la Terre et transmises à l’Institut national de recherches spatiales (INPE) du Brésil pour surveiller les défrichement des forêts, l’expansion de l’agriculture et l’utilisation des terres.

Les locaux de l’INPE sont pourtant loin de l’Amazonie, situés dans la ville de Sao José de Campos, dans le sud-est du Brésil, non loin de Sao Paulo. Mais les milliers d’images satellites envoyées aux observateurs leur donnent une idée précise de ce qui se passe quotidiennement dans la forêt.

« C’est le seul projet au monde à faire un suivi de cette ampleur », explique à l’AFP le coordinateur du programme, Claudio Almeida, en faisant visiter le centre.

« Toute l’Union européenne pourrait s’insérer dans l’Amazonie, avec un petit morceau à l’extérieur. La surveiller signifie donc qu’il faut être à la pointe de la technologie de télédétection », souligne-t-il.

Né sous la dictature

Ce programme de surveillance est d’abord né sous la dictature militaire (1964-1985). Des responsables avaient alors commandé une étude satellite de la forêt pour suivre son expansion vers l’intérieur du pays.

Par la suite, sous la pression croissante des défenseurs de l’environnement, le gouvernement démocratique a décidé à partir de 1988 de l’utiliser pour suivre en continu les pertes forestières.

Au départ, une cinquantaine de spécialistes de la surveillance travaillaient sur des cartes géantes imprimées, indiquant sur du papier transparent des blocs bruns au milieu de l’étendue verte. À l’époque, il fallait deux ans pour réaliser une étude complète de la déforestation sur une année.

Aujourd’hui, l’équipe reçoit chaque jour des images en basse résolution et peuvent, dès le lendemain, alerter la police sur des activités suspectes. « Cela permet une plus grande rapidité pour effectuer les contrôles », explique Claudio Almeida.

Grâce à la surveillance par satellite, il n’est pas rare que les autorités arrêtent des malfaiteurs en flagrant délit.

En novembre, c’est aussi l’INPE qui a donné l’alerte, informant que la déforestation de l’Amazonie avait atteint en 2017 son plus haut niveau en 10 ans, soit 7.900 km², l’équivalent d’un million de terrains de football.

« C’est inquiétant, nous sommes bien au-dessus de l’objectif fixé », s’alarme M. Almeida, rappelant que le gouvernement brésilien s’était engagé à ramener la déforestation à 3.500 km² par an d’ici à 2020.

Satellite national

Pour renforcer ses capacités de surveillance, l’INPE s’emploie à lancer son propre satellite, Amazonia-1, entièrement développé au Brésil. Au coeur du centre d’études spatiales, des ingénieurs s’affairent auprès de deux satellites en construction.

L’un est l’Amazonie-1, séparé par un drap noir de son cousin plus grand : CBERS-4A, construit conjointement avec des scientifiques chinois.

Le CBERS-4A, dont le coût est estimé à 300 millions de dollars, est actuellement à l’essai dans le laboratoire de l’INPE avant son lancement prévu l’an prochain.

D’un budget plus modeste de 77 millions, l’Amazonie-1, devrait être lancé en 2020. « C’est très important pour le Brésil de maîtriser cette technologie », souligne Claudio Almeida.

Mais surveiller la déforestation est une chose. L’arrêter en est une autre.

Le ministère de l’Environnement manque cruellement de personnel et de ressources quand il s’efforce d’intervenir contre les activités illégales.

Il y a aussi des vents contraires de plus en plus forts. Le président élu d’extrême droite Jair Bolsonaro, qui prendra officiellement ses fonctions le 1er janvier, a annoncé qu’il pourrait assouplir les contrôles environnementaux en faveur de l’expansion agricole.

Avec AFP