La Réunion : La Nouvelle Route du Littoral, point d’étape sur le plus grand chantier de l’Outre-mer

La Réunion : La Nouvelle Route du Littoral, point d’étape sur le plus grand chantier de l’Outre-mer

Avec l’accélération de la pose des piles pour le grand viaduc en mer début janvier, le chantier de la Nouvelle Route du Littoral va connaître un pic d’activité les deux prochaines années.  Retour sur ce plus grand chantier de l’outre-mer et de France. 

Pour décongestionner un trafic routier saturé de 60 000 voitures/jour et sécuriser cette route en corniche régulièrement affectée par les éboulis de la falaise ou des intempéries qui obligent à des basculements de circulation, la Région Réunion a lancé le chantier de la Nouvelle Route du littoral en décembre 2013, sous la première mandature du président Didier Robert. Le projet est titanesque. Il s’agit de construire un axe routier long de 12,5 km dont la moitié serait posé sur un viaduc maritime, le plus long de France. L’édifice accueillera une 2X2 voies, une voie pour un futur transport en commun en site propre (TCSP)ainsi qu’une piste cyclables. À ce projet d’infrastructure gigantesque, s’impose le défi supplémentaire d’édifier une structure capable de résister aux assauts de la houle et des cyclones. Cette route sur l’Océan Indien a suscité des polémiques du côté de l’opposition qui dénonçait des travaux nocifs pour l’environnement et excessifs financièrement. Cependant, cette route maritime d’un coût de 1, 6 milliard d’euros avait été préférée au projet de Tram-train initié par l’ancien président de Région Réunion, Paul Vergès. Motif: le gouvernement  avait refusé d’apporter un  financement complémentaire pour ce tramway qui devait desservir l’île du Nord à l’Ouest sur 40 km.

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Un précédent: la Route des Tamarins

En matière de projet routier impressionnant, la Région Réunion n’en est pas à son coup d’essai.  8 ans plus tôt, l’ancienne majorité avait mis sur pied le projet de la Route des Tamarins. Comme pour la Nouvelle Route du Littoral, cette Route des Tamarins en service depuis 2009, présentait des défis techniques importants.
En effet, elle se situe dans un environnement montagneux très escarpé d’origine volcanique. Cette 2×2 voies  avait pour objectif de relier par l’ouest Saint-Denis, capitale de l’île au nord, à toute la partie sud de l’île, par le Port, St Paul et l’Étang-Salé. Ce projet était déjà considéré comme la plus importante infrastructure routière jamais réalisée à la Réunion (33,7 km de tracé, 120 ouvrages d’art dont 4 viaducs monumentaux et 23 ponts non courants, 9 échangeurs routiers). En 2007, il s’agissait du plus gros chantier routier français et l’un des plus importants à l’échelle européenne. Coté technique, il fallait composer avec un terrain aux caractéristiques géologiques, climatologiques et hydrologiques complexes générant des contraintes très fortes tout au long de sa phase de conception et dans ses modalités de réalisation en raison de l’hétérogénéité et des incertitudes du terrain.

Tableau comparatif Route des Tamarins/Nouvelle Route du LittoralDoper l’économie réunionnaise

En 2010, le projet de la Nouvelle Route du Littoral intervient dans un contexte économique difficile. La crise de 2008 fragilise fortement le secteur du BTP à la Réunion. Le secteur avait perdu près de 10 000 emplois en deux ans, et avait vu son chiffre d’affaires annuel chuter de 30%. Sauver l’économie du BTP par le chantier de la NRL, un argument que Didier Robert n’a pas manqué d’avancer.

« Au-delà de sa finalité première qui est d’offrir à la population un axe de circulation sécurisé entre Saint-Denis et La Possession, le chantier NRL apporte une bouffée d’oxygène à l’économie locale, et d’abord au secteur du BTP qui a subi la plus grave crise de son histoire depuis 2008. La majeure partie des travaux du chantier NRL sont réalisés par des entreprises locales », souligne le Président de Région. « Notre politique économique depuis 2010 reste centrée sur l’aide aux entreprises et sur la réalisation des grands chantiers réunionnais pour rééquilibrer l’aménagement du territoire, tout en nourrissant les carnets de commandes des entreprises locales, et par là l’emploi. Une politique régionale qui produit de résultats puisque La Réunion a observé une croissance de plus de 3% en 2014, alors qu’elle était voisine de 0% en 2010 ».  Mais sur ce chantier, on retrouve également de grandes entreprises françaises de construction. Les deux principales tranches du chantier de la NRL ont été confiées aux groupements Vinci/Bouygues et GTOI (Colas, filiale de Bouygues)/SBTPC, pour un montant de 1,2 milliard d’euros. En troisième position, on retrouve le groupe Eiffage qui a obtenu l’appel d’offres pour le Viaduc de la Grande Chaloupe.

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Autour de ces grandes entreprises, gravitent des entreprises locales. C’est le cas du  leader incontesté sur l’île en production et vente de granulats, la Société de Concassage et de Préfabrication de La Réunion. La SCPR est une filiale de GTOI, elle même filiale du groupe Bouygues. Le deuxième plus important gérant de carrière de la Réunion est la société HOLCIM, également leader avec Lafarge dans le domaine du ciment. L’intégration de ces entreprises locales résulte de l’exigence émise par le Conseil Régional de recourir en priorité aux carrières locales pour la fourniture de matériaux.

Vers une insertion de la Réunion dans le développement de la croissance africaine?

Selon l’économiste réunionnais Philippe Jean-Pierre, c’est l’ensemble de l’économie réunionnaise qui profitera sur le long terme de la Nouvelle Route du Littoral. « Cette infrastructure sécurisée facilitera la liaison ouest-nord-est de l’île et ainsi réduira le temps de transports (marchandises et hommes) entre ces deux parties de l’île. A l’image de ce qui s’est passé pour la Route des Tamarins (qui a diminué le coût de transport par 3 entre le Nord et le Sud) la NRL est une infrastructure qui jouera favorablement sur la productivité des entreprises (réduction des coûts de transport, extension des marchés et donc du chiffre d’affaire). Cette refondation urbaine est une condition nécessaire pour projeter La Réunion dans le 21eme siècle et dans l’ère mondialisée qui concernera prochainement le continent africain (4eme territoire de mondialisation). Pensons que d’ici 25 ans, pas moins de 6 villes de la côte Est africaine seront des mégapoles de 20 millions d’habitants »,  poursuit l’économiste.

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Mais avant de profiter des avantages de cette nouvelle infrastructure, les Réunionnais devront encore faire preuve de patience avant la livraison de la NRL en 2019-2020. La Région Réunion a  engagé de nouvelles phases de travaux durant cette année sur le chantier pour un montant de 300 millions d’euros. Ainsi, elle prévoit la réception du viaduc de la Grande Chaloupe, l’achèvement de la partie inférieure de la digue de Saint-Denis et le début de la réalisation de sa partie supérieure, les travaux du tronçon de digue au sud de la Grande Chaloupe et ceux du viaduc du littoral (pose de pile et du tablier). De nouvelles mesures environnementales seront également mises en oeuvre comme la gestion et la restauration de terrains dans le massif de la Montagne, la mise en œuvre d’une aire de quiétude pour les mammifères marins, la restauration d’une plage de ponte pour les tortues, le lancement d’études du projet éco-récifs et pour la mise en place d’une aire marine protégée et gérée.

« Un chantier qui contribue au rayonnement de la Réunion »

« Le chantier NRL a commencé à générer un intérêt au plan international, tant en raison du caractère exceptionnel des ouvrages d’art qu’il comporte que des techniques particulièrement pointues auxquelles il fait appel, notamment en matière de précautions environnementales. Les entreprises réunionnaises seront en mesure à terme d’exporter leur savoir-faire dans le domaine des travaux maritimes et de l’aménagement off-shore. Ce chantier, au-delà de ses bénéfices évidents pour notre territoire et pour la population, va contribuer au rayonnement de La Réunion. C’est un chantier utile, porteur, dont nous avons toutes les raisons d’être collectivement fiers. » , Didier Robert.