Etats-Unis/Cuba : La fin de l’embargo se jouera-t-elle sur une « guerre de rhums » ?

Etats-Unis/Cuba : La fin de l’embargo se jouera-t-elle sur une « guerre de rhums » ?

Une décision prise aux Etats-Unis concernant un rhum cubain vient raviver une guerre qui dure depuis des années. Deux grands groupes de spiritueux se disputent la commercialisation de la même marque sur le sol américain.

Le bureau des marques et des brevets des Etats-Unis (USPTO) a temporairement donné au gouvernement cubain le droit de vendre son rhum Havana Club aux Etats-Unis dès que l’embargo contre La Havane sera levé, précise l’AFP. Une décision qui n’est pas du goût de la société Bacardi, détenteur de la marque sur le sol américain. Il faut remonter quelques années plus tôt pour comprendre cette « guerre du rhum ». La société Bacardi, qui commercialisait le rhum Havana Club à Cuba jusqu’à la révolution castriste de 1959, s’est ensuite exilée aux Bermudes suite à la saisie des avoirs de la société par le gouvernement castriste.  En 1993, les Français de Pernod-Ricard créent avec les Cubains la co-entreprise Havana Club International. En raison de l’embargo américain sur tous les produits d’origine cubaine, le rhum Havana Club n’est pas commercialisé aux Etats-Unis. En 1996, le groupe Pernod-Ricard découvre que Bacardi a lancé son propre rhum sous la marque…Havana Club, produit à Porto Rico.  Deux ans plus tard, Bacardi active son réseau et parvient à faire voter la loi 211 par le Congrès américain. Cette loi interdit désormais l’enregistrement de la marque Havana Club sur le territoire américain. Conséquence : la loi retire les droits de Pernod Ricard sur la marque Havana Club aux Etats-Unis, tandis que Bacardi continue d’y commercialiser son rhum Havana Club. S’ensuit une longue bataille juridique. Cette affaire sera même porté devant la Cour Suprême en 2012, mais celle-ci avait refusé de discuter de cette affaire sur le fond.

Selon les documents de l’USPTO, l’entreprise cubaine avait obtenu lundi une permission spéciale de l’Office pour le contrôle des avoirs étrangers (OFAC), qui dépend du Trésor. La société a donc aussitôt déposé les documents nécessaires à l’USPTO, qui a fait droit à sa demande mercredi. Bacardi s’est déclarée « surprise » par cette décision dans un communiqué publié samedi, et a fait savoir qu’elle engagerait « tous les recours légaux nécessaires » pour défendre ce qu’elle considère comme ses « droits légitimes » sur la marque Havana Club. Du côté du groupe Pernod, on reste prudent. « C’est une bonne décision, mais il n’y a pas de raison d’être triomphaliste. Pour le moment il s’agit seulement d’un processus administratif qui aujourd’hui n’a aucun impact sur l’entreprise du fait de l’embargo et du conflit légal » pas encore définitivement réglé, a réagi Olivier Cavil, directeur de la communication du groupe Pernod Ricard, dans un message transmis à l’AFP. En attendant l’issue de cette bataille juridique, Cuba évalue à plus de 100 millions de dollars le manque à gagner dû à l’impossibilité de vendre son rhum aux Etats-Unis.