©Outremers360 (archives)
Ce lundi 23 décembre, l’Institut d’Émission d’Outre-mer lance sa première opération de refinancement à 6 mois (LR6) du secteur bancaire des trois territoires du Pacifique. « C’est une première puisque jusqu’à présent l’IEOM n’a jamais fait d’opération à un terme aussi éloigné », nous a expliqué Marie-Anne Poussin-Delmas, qui dirige les Instituts d’Émission d’Outre-mer (IEDOM/IEOM). L’enveloppe globale allouée est de 25 milliards de francs CFP, soit 209,5 millions d’euros.
Outremers360 : Pouvez-vous nous expliquer cette ligne de refinancement à 6 mois à destination du secteur bancaire des territoires du Pacifique ? Pourquoi l’IEOM a pris cette décision ?
Marie-Anne Poussin-Delmas : Le franc CFP de l’IEOM est à parité fixe avec l’euro, ou le franc auparavant, depuis sa création en 1945, tout en étant une monnaie différente. Cela permet de bénéficier de la stabilité des prix et de la stabilité financière de la zone. Ça permet aussi d’apporter une crédibilité puisque le franc CFP (XPF) est considéré comme étant une monnaie sûre qui conforte l’attractivité de la zone Pacifique vis-à-vis des investisseurs étrangers mais sa différence de l’euro permet d’avoir une politique monétaire qui n’est pas alignée sur celle de l’euro-système.
Précisément, le Conseil de surveillance de l’IEOM qui s’est réuni le 17 décembre 2019, a examiné la situation économique, monétaire, bancaire des trois territoires du Pacifique et décidé de mettre en place une ligne de refinancement d’une durée de 6 mois au profit des établissements de crédit de Nouvelle-Calédonie, Polynésie et Wallis et Futuna. Le Conseil a constaté deux choses : un grand besoin de financement de l’économie calédonienne qui connait un certain essoufflement et la poursuite d’une politique monétaire accommodante de la part de l’euro-système. C’était le moment de mettre en place une ligne de refinancement à 6 mois au profit du secteur bancaire.
Concrètement, comment cela se traduit ?
C’est une opération de prêt de la part de l’IEOM en faveur des banques de la zone franc CFP qui, en contrepartie, remettent un collatéral, c’est-à-dire des créances sur les entreprises. C’est une garantie du prêt que consent l’IEOM. Le taux appliqué à cette opération est de 0,20%. Il est ce qu’on appelle chez les banquiers centraux, « dans le corridor » : c’est-à-dire l’écart entre le taux de la facilité de dépôt (-0,20%) et le taux du prêt marginal (+0,25%). C’est deux taux directeurs sont inchangés et le taux de la LR6, c’est 0,20%.
La première opération a été lancée le 23 décembre, pour un règlement avant la fin de l’année. C’est un apport de ressources stables qui est important parce que l’enveloppe globale qui va être allouée est de 25 milliards de francs CFP, dont 17 pour la Nouvelle-Calédonie et 8 pour la Polynésie française. Cette enveloppe a été déterminée en fonction de l’appréciation par le Conseil des besoins de refinancement des deux grandes économies de la zone et aussi des créances sur les entreprises qui peuvent être apportées en collatéral auprès d’instituts d’émissions. Concernant Wallis et Futuna, l’archipel n’a qu’une seule banque qui bénéficie de liquidité en Nouvelle-Calédonie.
En quoi cette opération est-elle inédite ?
C’est une première puisque jusqu’à présent l’IEOM n’a jamais fait d’opération à un terme aussi éloigné. C’est une durée qui est beaucoup plus longue que ce qu’on fait à l’accoutumée et qui répond vraiment au besoin de liquidité des banques. L’autre avantage pour les banques, c’est que cela va permettre de conforter leur ratio prudentiel demandé par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
Cette liquidité de refinancement à 6 mois matérialise aussi l’engagement qui a été pris par l’État à l’issue du Comité des signataire de l’Accord de Nouméa du 10 octobre, qui prévoyait une augmentation des capacités de financement de l’IEOM en faveur de l’économie calédonienne, à hauteur de 17 milliards.