Economie: En Nouvelle-Calédonie, la réforme fiscale divise

Economie: En Nouvelle-Calédonie, la réforme fiscale divise

Le projet de loi du pays sur la Taxe Générale à la Consommation de la Nouvelle-Calédonie fait des remous dans la sphère économique et politique. Visant à « tourner la page de l’économie de comptoir« , les défenseurs de cette refonte complète de la fiscalité la jugent indispensable tandis que ses pourfendeurs l’estiment dangereuse pour les entreprises et l’emploi.

« Son principe est assez simple« , expliquent Les Nouvelles Calédoniennes. Le projet de loi de pays sur la Taxe Générale à la Consommation (TGC) a pour but de substituer toutes les taxes actuelles par cette unique taxe, à l’image de la TVA française. Seules les taxes douanières sur les produits importés hors Union Européenne resteront puisque, rappelons-le, il s’agit d’une taxe d’Etat. « La TGC sera déclinée en quatre taux : 0%,3%, 11% et 22 % selon les services et les produits » (lire encadré à la fin de l’article).

Inflation ou déflation ?

Toujours selon le quotidien calédonien, la mise en place de cette nouvelle taxe aurait un effet inflationniste, « si l’on s’en tient aux calculs purement mathématiques« . Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie s’est donc rapproché de l’intersyndicale contre la « Vie chère » et des organisations patronales, dans le cadre de discussions sur la réforme ainsi que sur un volet consacré à la compétitivité.

Ces dernières années, la Nouvelle-Calédonie a été le théâtre de nombreuses manifestations contre la vie chère ©Marc Le Chelard / AFP

Ces dernières années, la Nouvelle-Calédonie a été le théâtre de nombreuses manifestations contre la vie chère ©Marc Le Chelard / AFP

Un volet du projet de loi destiné à limiter cette inflation pour les consommateurs.

C’est ce texte, et plus précisément l’article 19 qui ferait en ce moment débat dans la sphère politique et économique calédonienne. Cet article impose aux entreprises dont le taux de marge est de 30% -25% pour le secteur automobile- « de les geler après le passage complet à la TGC« , c’est-à-dire, dès juillet 2018 et pour une période de 18 mois. Toutes les entreprises devront s’y plier, sauf accord de branche ou si leur chiffre d’affaires est inférieur à 500 000 euros (60 millions de francs pacifique).

« Plusieurs entreprises, notamment celles qui importent, verront leur marge en valeur mécaniquement baisser. La marge se calculait en effet jusqu’ici sur un produit TTC, et elle devra s’appliquer demain sur le produit hors taxes« , précisent Les Nouvelles. Ces baisses en valeur pourraient aller jusqu’à 20% « dans les cas extrêmes« . En période de crise économique, les entreprises calédoniennes ne seraient pas prêtes à accepter cette baisse. Et c’est là que l’emploi entre en jeu puisque les entreprises devraient alors limiter leurs coûts et donc leurs masses salariales.

Une bataille de communication

Toujours selon les entreprises de Nouvelle-Calédonie, le gouvernement récupérerait de surcroît et grâce à la TGC, les 51 milliards de taxes (soit environ 428 millions d’euros) déjà perçues. Du côté du gouvernement, la principale conséquence de cet article 19 serait, au contraire, le maintient voire même la baisse des prix. On estime également que les accords de branche permettront à toutes les entreprises de s’y retrouver et ce, bien avant le lancement de la réforme.

Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie examine depuis aujourd'hui le projet de loi de pays instaurant la Taxe générale sur la consommation ©Archives / Les Nouvelles Calédoniennes

Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie examine depuis aujourd’hui le projet de loi de pays instaurant la Taxe générale sur la consommation ©Archives / Les Nouvelles Calédoniennes

Une véritable bataille de communication s’est donc mise en place en Nouvelle-Calédonie et autour de cet article 19 du volet compétitivité du projet de loi. Ceux qui veulent voir cette réforme aboutir ont peur que la Nouvelle-Calédonie n’arrive pas à se réformer tandis que les opposants craignent de voir une situation économique, déjà en berne avec la crise du nickel, se détériorer.

En attendant, la charge revient aux élus du Congrès calédonien qui examinent ce projet de loi dès aujourd’hui. Les commissions proposeront des amendements si nécessaire.

 

Le projet de loi de pays sur la Taxe Générale à la Consommation

Cette réforme sur la fiscalité indirecte préconise l’installation d’une unique taxe en remplacement de sept droits et taxes, à savoir: la taxe générale à l’importation, la taxe de base à l’importation, la taxe de fret aérien ou taxe de port, la taxe de solidarité sur les services, la taxe sur les nuitées hôtelières et le droit proportionnel de la patente.

La TGC instaurera de nouveaux taux :
– Taxe à 0% pour la santé et l’éducation,
– Taxe à 3% pour les denrées alimentaires de base, services à la personne, produits de première nécessité, production industrielle locale,
– Taxe à 11% pour l’alimentaire, les vêtements, le logement et les carburants,
– Taxe à 22% pour les boissons sucrées et alcoolisées, le tabac, les équipements de la maison et l’automobile.

Le gouvernement calédonien souhaite une entrée en vigueur de la TGC en deux temps, avec « une marche à blanc », de janvier 2017 à juillet 2018. Il s’agit en fait de superposer des taux faibles à la fiscalité existante. « Ces taux de 0,25 %, 0,5 % et 1 % seront appliqués pendant un an et demi à la place des taux définitifs de 3 %, 11 % et 22 %« . En juillet 2018, les sept droits et taxes seront « désarmés » et les taux définitifs instaurés. C’est à ce moment là que l’article 19 du volet compétitivité se mettra en place pour les entreprises qui ne bénéficieront pas d’accords de branche et dont les taux de marge seront d’au moins 30%.

Si la TGC est votée, les entreprises achèteront leurs produits hors taxes. Pour le gouvernement, cette réforme maintiendrait les prix, les ferait baisser même. Néanmoins, les opposants affirment le contraire.