©Christopher Liau / PYF Spotters
Les salariés de la compagnie Air Tahiti semblent faire bloc derrière leur entreprise et leur Directeur général. Dans le conflit qui oppose la compagnie domestique polynésienne et le gouvernement de la Collectivité, un Commandant de bord a publié une lettre ouverte suite aux propos du ministre local des Transports, qui dénonçait hier un « chantage » de la compagnie.
Rappel des faits. La compagnie aérienne domestique Air Tahiti, ne pouvant plus financièrement assurer la desserte de 27 lignes déficitaires, a annoncé vendredi l’abandon de cette mission de service public non officiel. Avant la crise du covid-19, la compagnie équilibrait le déficit de ces lignes grâce aux 20 autres lignes de son réseau, bénéficiaires. Depuis quelques années déjà, la compagnie demande la participation du pays au financement des lignes déficitaires, en vain. Face à l’annonce de cet abandon, le ministre local des Transports Jean-Christophe Bouissou a dénoncé « un chantage » et une « prise d’otages » des populations vivants sur ces lignes déficitaires.
« Il me semble important de rappeler que, depuis que la convention cadre du transport aérien liant Air Tahiti au Pays est arrivée à péremption (2010), tous les gouvernements qui se sont succédés ont volontairement ignorer la nécessité de faire avancer le dossier du Schéma Directeur des Transports en Polynésie », a écrit un Commandant de bord de la compagnie, dans une lettre ouverte adressée au ministre des Transports. « Depuis 2009, le Pays fait le choix de laisser les passagers locaux et internationaux à destination des îles bénéficiaires assumer le financement des îles déficitaires, soit la part de service public qui vous revient ».
Soulignant que « les frais fixes afférents aux îles déficitaires restent une menace quotidienne à sa survie », le Tomana (Commandant en tahitien) estime que la compagnie « ne peut plus infliger à ses passagers la part financière » qui revient au gouvernement de la Collectivité « au risque de tuer les seules destinations pouvant encore être sauvées ». « Je suis excédé par vos pratiques électoralistes, démagogue », fustige le Commandant, regrettant l’ « incapacité » du ministre visé « à apprécier à juste titre le magnifique outil dont vous disposez à ce jour ». À savoir, une compagnie dimensionnée pour assurer la desserte d’un territoire insulaire éclaté, alors que le ministre a menacé la compagnie de créer une nouvelle si elle ne reprenait pas la desserte des 27 îles déficitaires.
« Une idée ridicule » selon le Commandant. « Vous semblez donc avoir les moyens de financer la création d’une compagnie qui irait vers ces îles, à perte, mais pas d’un service public assuré par une société privée, professionnelle de surcroit qui a les moyens structurels de le faire ? », s’interroge-t-il, cinglant. Le Commandant de bord appelle « le Pays » à « assumer entièrement la part financière de la mission de service public supportée par notre clientèle » et ainsi « laisser Air Tahiti proposer des tarifs décents à sa clientèle pour asseoir cette « économie polynésienne au sein des archipels » que tous les acteurs du tourisme attendent ».