©P. Pigeyre
Dans un entretien accordé à La Tribune, Jean-Paul Dubreuil, président du groupe éponyme, et Marc Rochet, vice-président du conseil d’administration d’Air Caraïbes et président de French Bee, tablent sur une reprise progressive des deux compagnies en juin, sauf prolongation de l’épidémie.
Alors que French Bee a déjà suspendu sa desserte de San Francisco et Papeete, les deux compagnies du groupe Dubreuil vont suspendre toutes leurs autres lignes à partir du 28 mars. Mais déjà, les deux dirigeants pensent à la reprise, qu’ils prédisent début juin de manière progressive, en prenant en compte une marge de deux à trois semaines en cas de prolongation de l’épidémie . Elles commenceront par le cœur du réseau : les Antilles et la Guyane pour Air Caraïbes, et La Réunion pour French Bee.
La reprise de San Francisco par French Bee aura quant à elle lieu au courant de l’été. Concernant le Paris – New York que French Bee devait inaugurer en juin, son ouverture n’est pas remise en cause mais aura lieu après la date prévue du 10 juin. Enfin, les lignes plus touristiques et portées par les tours opérateurs, comme Cuba ou Punta Cana en République dominicaine, devraient « redémarrer plus tard », en raison des grandes difficultés rencontrées par les voyagistes, précise La Tribune.
Papeete : « une route complexe (…) durement touchée »
Reste une incertitude : la ligne vers Tahiti-Faa’a (Papeete), incertaine. « Nous ne savons pas encore où la placer dans ce dispositif. C’est une route complexe qui a été la plus durement touchée », regrette Marc Rochet. De son côté, Jean-Paul Dubreuil espère une totale remise en service de ses 14 gros-porteurs (Air Caraïbes et French Bee) d’ici la fin de l’année. Et pour supporter économiquement cette mise sous cloche, les deux dirigeants ne paraissent pas inquiets.
L’association internationale du transport aérien (IATA) estiment que bon nombre de compagnies n’ont que deux mois de trésoreries devant elles. Ce qui ne serait pas le cas pour le groupe Dubreuil. « Nous abordons la crise en pleine forme », assure Jean-Paul Dubreuil. « Nous avons réalisé en 2019 un chiffre d’affaires d’environ 700 millions d’euros et une marge opérationnelle de 5%, malgré la hausse de la facture carburant et du dollar. Et les résultats des deux premiers mois de 2020 ont été meilleurs que prévu ».
« Même s’il n’en pas besoin, le groupe Dubreuil a levé 100 millions d’euros pour avoir de l’eau sous la quille. Notre pôle aérien dispose d’une trésorerie de 250 millions d’euros dans laquelle nous ne comptons pas puiser pendant cette période, car les dépenses vont être à peu près compensées par le résultat enregistré du 1er janvier au 15 mars 2020 », ajoute-t-il. Jean-Paul Dubreuil compte donc sur les résultats du premier trimestre pour couvrir « un volume de dépenses net relativement limité ». Les charges du groupe sont également amorties par la prise en charge par l’État du chômage partiel et le report des cotisations sociales.
Aide de l’État à Air France : « pas logique sur le plan concurrentiel »
« Nous n’allons pas nous lamenter. L’État a fait son devoir sur la partie charges salariales. Il faut que les entreprises prennent la main et ne se laissent pas aller à la sinistrose. On ne veut pas attendre la manne étatique du sauveur », insiste encore Jean-Paul Dubreuil. « Une crise se traduit par un rebond, et nous voulons être prêts pour cette phase. Nous allons travailler sur la reconquête de nos marchés à l’orée de l’été ». Bénéficiaire chaque année, Dubreuil espère même être « un peu positif » pour l’année 2020.
En revanche, les deux dirigeants voient d’un mauvais œil l’aide que l’État prévoit d’accorder à Air France, dont il est actionnaire à 14,3%. On parle là d’une aide autre que la prise en charge du chômage partiel et le report des cotisations salariales. « Ce n’est pas très logique sur le plan concurrentiel. Pourquoi une compagnie plutôt qu’une autre bénéficierait de la manne de l’État qui leur permet d’avoir une position beaucoup plus laxiste que la nôtre car elle entretient l’idée que l’État viendra toujours à son secours ? », s’interroge Jean-Paul Dubreuil.