1,3 millard d’euros. C’est le montant que rapportent chaque année les récifs coralliens, herbiers et mangroves aux économies des neuf collectivités des Outre-mer. C’est l’un des nombreux éclairages sur l’environnement familier des Collectivités ultramarines qu’a apporté l’institut IFRECOR (Initiative Française pour les récifs coralliens) à l’occasion d’un colloque organisé à l’Institut océanographique de Paris pour ses 15 ans.
« On prend soin de quelque chose dans trois cas précis: lorsqu’elle suscite de l’émerveillement, qu’elle nous appartient ou quand elle nous rapporte des bénéfices », déclare Pascal Nicolas, économiste de l’environnement au Centre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement. Conduit pendant près de 5 ans, cette étude permet pour la première fois de quantifier ces espaces vitaux en Outre-mer . « Il ne s’agit pas de dire que la nature est à acheter ou à vendre mais de rendre compte de l’importance de l’environnement dans nos sociétés. Cette thématique a une place toute aussi importante que l’éducation, la santé, etc », précise l’expert. Un avis que partage Barbara Pompili, la sécrétaire d’Etat chargée de la biodiversité présente à cet évènement. « La valeur économique des récifs coralliens des Outre-mer français permet aussi de quantifier le manque à gagner en cas de perte et de dégradations de ces espaces », ajoute-t-elle.
Ces récifs coralliens, herbiers et mangroves contribuent à hauteur de 2% en moyenne dans le produit intérieur brut de ces collectivités. Un chiffre qui peut aller jusqu’à 8% dans certaines économies, comme à Saint-Barthélémy. La richesse économique s’appuie sur deux types de services rendus par les récifs coralliens. D’abord, les services rendus dit « visibles » comme le tourisme bleu ou le secteur de la pêche et de l’aquaculture. À titre d’exemple, la perliculture représente un marché de 30 millions d’euros pour l’économie de la Polynésie Française. Puis, il existe des services rendus appelés « invisibles », à l’instar de la protection côtière et de la séquestration du carbone. Ainsi, les récifs coralliens des Outre-mer absorbent chaque année 2 millions de tonnes de CO2, soit l’équivalent du nombre de tonnes de carbone rejetées par le traffic aérien en Outre-mer. Nicolas Pascal rappelle également que ce sous-sol corallien stocke 80 millions de tonnes de CO2.
Vers une pharmacopée issue des coraux ?
Mais les bénéfices de ces zones récifales ne sont pas seulement économiques, comme le souligne Pascale Joannot, directrice adjointe des collections au Muséum National d’Histoire Naturelle. La question de la recherche sur les coraux ne doit pas uniquement se poser en terme environnemental et écologique. Il existe un potentiel non négligeable des coraux en matière médicale. Sur les premières espèces quantifiées et recensées, certaines ont des propriétés anti-cancéreuses, anti-virales ou anti-inflammatoires.
Mais toutes ces richesses issues des récifs coralliens et les mangroves sont aussi chaque jour un plus fragilisés, contraste Aurélie Thomassin, chargée de mission Biodiversité et des récifs coralliens auprès du Ministère de l’écologie. La spécialiste a dressé un état des lieux des récifs coralliens et des écosystèmes associées. Une situation d’autant plus complexe puisque chaque collectivité d’Outre-mer présente des spéficités. Ainsi,en Guadeloupe,le taux de recouvrement corallien a diminué de 30 à 50%. À l’inverse, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie Française disposent encore de zones récifales en bonne santé et préservées. Cependant, ces territoires du Pacifique font face à de nouvelles menaces (l’acanthaster et les cyclones très violents) qui peuvent modifier ce constat.
Encadré :
Créée en 1999, l’IFRECOR agit pour la protection et la gestion durable des récifs coralliens et des écosystèmes associés (mangroves, herbiers) dans les collectivités françaises d’outre-mer. L’IFRECOR est la déclinaison nationale de l’Initiative internationale pour les récifs coralliens (ICRI) initiée en 1995 par les Etats-Unis. Un réseau de 8 comités locaux dans les territoires ultra-marins abritant des récifs coralliens: Guadeloupe, Saint- Martin, Martinique, La Réunion, Mayotte, les îles Éparses (de l’océan indien), Nouvelle-Calédonie, Wallis et Futuna et la Polynésie française. Saint-Barthélémy a souhaité récemment avoir son comité local. C’est l’écrivain académicien Érik Orsenna qui parraine le 15ème anniversaire de l’IFRECOR.