©Pierre Lesage
C’est un lieu sacré de 2.500 hectares, situé sur l’île de Raiatea dans l’archipel des Îles-Sous-le-Vent, et considéré comme le berceau du monde polynésien: le marae de Taputapuatea, en Polynésie française, pourrait être inscrit, ce dimanche 9 juillet, au Patrimoine culturel mondial de l’Humanité, une première pour les Outre-mer dans le volet culturel.
« On espère une reconnaissance internationale » pour ce site, qui revêt « une importance religieuse, spirituelle, sociale, culturelle, cultuelle et politique », a expliqué le ministre de la Culture de la Polynésie française, Heremoana Maamaatuaiahutapu, qui s’est rendu vendredi avec le Président de la Polynésie, Édouard Fritch, à Cracovie(Pologne), où se tient la réunion du Comité du patrimoine mondial de l’Unesco. Si ce site est reconnu par l’Unesco, ce sera une première pour les Outre-mer, qui ont déjà quelques sites naturels classés, mais aucun « culturel » (voir encadré).
Ce marae (lieu sacré polynésien), qui compte une partie terrestre et une partie maritime, a « une importance particulière pour l’ensemble du monde polynésien, pas seulement pour la Polynésie française », a insisté le ministre, citant par exemple Tonga, Samoa, Hawaii, les îles Cook, la Nouvelle-Zélande ou l’île de Pâques. Un marae est un lieu de culte, où se pratiquaient les cérémonies, avant l’évangélisation venue d’Europe. Les ancêtres des Polynésiens y agençaient des centaines de pierres, qui disposaient selon eux de « mana » (qui peut à la fois se traduire par « pouvoir » et « force spirituelle »).
Berceau de la civilisation polynésienne
Mais le marae de Taputapuatea est considéré comme le berceau de la civilisation polynésienne, où se déroulaient des « cérémonies religieuses » et des « réunions politiques entre toutes les îles polynésiennes. Des décisions importantes y étaient prises avec l’ensemble des chefferies des îles. C’était presque les Nations unies de la Polynésie », précise le ministre. Symbole de l’expansion de la culture polynésienne, des marae liés au marae Taputapuatea existent dans tout le triangle polynésien, notamment à Hawaii au Nord, aux îles Cook et en Nouvelle-Zélande au Sud-Ouest. Les anciens polynésiens utilisaient une pierre de Taputapuatea comme première pierre à l’édifice d’autres marae dans les îles du Pacifique.
Taputapuatea est parsemé d’environ 300 vestiges archéologiques. Le site est « protégé par un classement local, mais en cas de classement par l’Unesco, il va falloir réfléchir à gérer le flux de touristes, pas forcément respectueux du site », aujourd’hui ouvert à tous, a admis Heremoana Maamaatuaiahutapu. « Ce site a toujours beaucoup d’importance aujourd’hui ». Il en veut pour preuve que c’est dans ce lieu que, le 17 juillet 2015, les dirigeants de la Polynésie française, de Niue, des îles Cook, de Samoa, de Tonga, de Tokelau et de Tuvalu, sept territoires et Etats du « triangle polynésien », ont adopté une déclaration commune dans la perspective de la COP 21. La candidature du marae de Taputapuatea a été soutenue par l’ancien président François Hollande, qui s’y était rendu en février 2016.
L’an dernier, le Centre cérémoniel Nan Madol en Micronésie fut le seul site du Pacifique classé au Patrimoine mondial, parmi 27 prétendants.
Avec AFP.
Les sites classés à l’Unesco en Outre-mer:
Au Patrimoine mondial de l’Humanité, l’Unesco a déjà classé le lagon de la Nouvelle-Calédonie et les Cirques et Pitons de La Réunion dans le volet « naturel ». Au Patrimoine immatériel, on retrouve la danse réunionnaise Maloya et la Région Réunion souhaite désormais inscrire le Sega. Le ministre polynésien de la Culture avait également évoqué le classement de la danse tahitienne au Patrimoine immatériel.
En plus de Taputapuatea, d’autres sites ultramarins ont également entamé une démarche de classement au Patrimoine mondial: la Montagne Pelée en Martinique, les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), le lagon de Mayotte ainsi que les îles Marquises en Polynésie française.