Au gauche l’Oyapock, à droite, la rivière Camopi, impactée par les boues de l’orpaillage illégal © PAG
La justice brésilienne a lancé deux mandats d’arrêts à l’encontre d’un chef coutumier et d’un agent du Parc amazonien de Guyane de Camopi suite à un échange de tir survenu le 20 février dernier. Une affaire qui ravit les tensions entre les riverains de cette frontière franco-brésilienne sur fond d’orpaillage clandestin.
Le procureur de la République Eric Vaillant, a indiqué hier à l’AFP l’émission de deux mandats d’arrêts par le Brésil envers deux habitants de Camopi, petite commune amérindienne de 600 habitants. Ces deux personnes, « un chef coutumier amérindien » et « un agent du Parc amazonien de Guyane » (PAG) sont présumés dans l’échange de tirs avec des « garimpeiros » (orpailleurs brésiliens). « Dans cette affaire il y a deux blessés par armes à feu, un français (chef coutumier) et un brésilien, et deux thèses qui s’opposent, chacun accusant l’autre d’être l’agresseur » selon le procureur de la République qui juge l‘ « affaire très sérieuse ». Pour connaître tous les tenants et aboutissants de cette affaire, une enquête a été ouverte par le parquet de Cayenne. Le président de la collectivité territoriale de Guyane, Rodolphe Alexandre (Guyane rassemblement) a réclamé, vendredi 15 avril, « le déploiement d’hommes supplémentaires sur zone, et ce avant que la situation ne dégénère totalement ». Il a affirmé « qu’il s’opposera fermement à toute demande d’extradition susceptible d’être transmise à la France par le Brésil dans le cadre de cette affaire. »
« Une situation explosive »
Camopi, située dans l’Est du PAG, sur la frontière franco-brésilienne, et uniquement accessible en pirogue, a déjà été le théâtre d’affrontements entre les orpailleurs brésiliens et les amérindiens. En juin 2013, un brésilien qui était sur une pirogue de ravitaillement des sites illégaux avait été tué par un gendarme. L’enquête avait conclu à la légitime défense. Le 18 avril, les Hurleurs de Guyane, un mouvement citoyen ayant pour unique cause la lutte contre l’orpaillage illégal, sensibilisait sur la « situation explosive » à la frontière franco-brésilienne. « Des villageois sont contraints de prendre les choses en main et réagissent : l’autodéfense semble être malheureusement leur seule solution face aux garimpeiros envahissant leurs zones de vie », précise le communiqué. Le collectif, pour expliquer ce contexte, met en exergue » les allées et venues incessantes des pirogues de ravitaillement vers les sites illégaux d’exploitation aurifère ». Les Hurleurs de Guyane fustigent également le manque de coopération de ces deux Etats concernant la question de l’orpaillage. « Brésil et France ont réussi à s’accorder sur la construction d’un pont aussi coûteux qu’inutile entre les deux Pays (sic). A contrario, les citoyens des deux rives ne peuvent que mesurer, au quotidien, l’inefficience des politiques publiques bilatérales face au trafic d’or. » Pourtant sur ce sujet, le ministre des affaires étrangères Jean-Marc Ayrault a répondu à une question écrite du député guyanais Gabriel Serville le 12 avril, affirmant que ‘la coopération est réelle entre la France et le Brésil, tant sur le plan politico-juridique que sur le plan opérationnel ».
Avec AFP.