« Ce qui t’est destiné, le courant ne l’emporte pas » ou le parcours hors norme de la comédienne guadeloupéenne, Firmine Richard

« Ce qui t’est destiné, le courant ne l’emporte pas » ou le parcours hors norme de la comédienne guadeloupéenne, Firmine Richard

Présentée juste avant le confinement, l’autobiographie de l’actrice guadeloupéenne, Firmine Richard « Ce qui t’est destiné, le courant ne l’emporte pas » parue aux éditions Michel Lafon, retrace le formidable parcours d’un Ovni du cinéma et du théâtre français. Un destin exceptionnel pour une femme d’exception qu’illustrent ses multiples engagements et combats en faveur de l’émancipation du monde noir et plus largement de la justice.  – Éclairage –

« Il n’y a dans la vie, ni aléas, ni hasard, il n’y a qu’attention portée aux détails ». Cette phrase attribuée à Clémenceau aurait pu être en exergue du livre de Firmine Richard tant elle reflète son état d’esprit et en dit long sur son parcours. « C’était ma destinée », assure plus prosaïquement Firmine Richard dans son autobiographie au titre évocateur « Ce qui t’est destiné, le courant ne l’emporte pas », titre emprunté à un adage fréquemment usité en créole aux Antilles « Sa ki ta vou, Riviè la pé ké chaye-y ».

Un destin incroyable en effet pour cette fille de docker et femme de ménage, employée jusqu’en 1988 au Conseil régional de Guadeloupe qui, de passage à Paris après y avoir travaillé (Ratp et la Poste), est repérée dans un restaurant par la directrice de casting de la réalisatrice Coline Serreau qui lui propose de participer au casting de « Romuald et Juliette », un conte de fée moderne avec notamment Daniel Auteuil et Isabelle Carré.

Firmine Richard et Daniel Auteuil dans "Romuald et Juliette"

Firmine Richard et Daniel Auteuil dans « Romuald et Juliette »

Essai réussi. Son authenticité, sa sincérité, sa gouaille naturelle, son absence de faux-semblant y compris dans son accent l’emporteront sur toute autre considération. Elle sera la « Juliette » des temps modernes de cette comédie romantique. Et alors que Firmine Richard n’avait jusque-là jamais joué la comédie, la voilà propulsée, à 40 ans, actrice principale dans une grosse production cinématographique, devenant ainsi la première antillaise à tenir un premier rôle dans un film à dimension nationale.

Une véritable révélation

Des débuts fracassants donc dans un monde du cinéma jusque-là inconnu pour elle. Son talent naturel éclate au grand jour. Une véritable révélation que les critiques ne manqueront pas de saluer. D’autant que cette comédie tendre et savoureuse qui se veut antiraciste et tente de faire tomber les tabous et l’intolérance par le rire, est un succès populaire.

Firmine Richard dans "8 femmes" de François Ozon

Firmine Richard dans « 8 femmes » de François Ozon

Dès lors, la voilà lancée, enchaînant films, téléfilms et pièces de théâtre avec des réalisateurs de renom parmi lesquels François Ozon (« Huit Femmes »), Dino Risi (« Valse d’amour »), Jean Becker (« Elisa »), Claude Lelouch (« Une pour toutes »), Claude Berri (« Ensemble, c’est tout »), Lucien Jean-Baptiste (« La Première étoile ») …, côtoyant de grandes stars du cinéma français (Catherine Deneuve, Isabelle Huppert, Sophie Marceau…) et internationales (Vittorio Gassman, Elliot Gould…).

Si, à 72 ans, Firmine Richard est désormais une des valeurs sûres du cinéma français et une personnalité populaire, rien n’a été cependant facile pour elle. « Je crois au destin. Il devait donc être écrit quelque part que mon chemin croiserait un jour celui du cinéma », affirme aujourd’hui la Guadeloupéenne. Mais, rappelle-t-elle, « cela ne signifie pas que je ne me suis pas battue avant pour tracer ma propre route et que je ne me bats pas depuis, chaque jour, pour poursuivre mon chemin ».

Actrice engagée et éprise de justice

Car Firmine Richard, actrice noire, a dû faire face à la sous-représentation des minorités et singulièrement des femmes noires dans le cinéma français. Ce n’est donc pas hasard là non plus qu’on la retrouve à la pointe de tous les combats en faveur d’une juste représentation des membres de la diversité dans le cinéma et à la télévision française. Un combat qu’illustre le livre « Noire n’est pas mon métier », co-signé avec d’autres comédiennes noires tels Aïssa Maïga, Sara Martins, Mata Gabin, Sonia Rolland ou encore France Zobda… Un livre plaidoyer pour plus de diversité dans le cinéma français.

Firmine Richard avec Michel Jonasz dans "La deuxième étoile" ©Mars Film

Firmine Richard avec Michel Jonasz dans « La deuxième étoile » ©Mars Film

Femme engagée et éprise de justice, les combats de Firmine Richard ne se limitent pas à sa profession puisqu’elle participe à nombre d’actions pouvant permettre de faire reculer l’injustice et l’intolérance, n’hésitant pas à donner de sa personne quand il le faut en étant par exemple la marraine de l’association SOS Madison International qui lutte pour les droits des enfants et des personnes handicapées dans le monde.

Fidèle à ses origines

Par ailleurs, en dépit de son succès et sa popularité, elle n’oublie pas d’où elle vient. Ses racines guadeloupéennes sont encore bien présentes et même omniprésentes au point où elle manque rarement les manifestations et évènements organisés au sein de la communauté ultramarine, n’hésitant pas à répondre aux sollicitations émanant de ces associations et usant même de sa notoriété pour leur venir en aide. Bref, toujours fidèle à ses origines.

Avec « Ce qui t’est destiné, le courant ne l’emporte pas », l’histoire de son parcours hors norme et atypique, Firmine Richard nous délivre une belle leçon de vie où percent des valeurs profondément ancrées dans ses racines antillaises. A méditer en ces temps troublés et de confinement forcé.

E.B.            

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