Caraïbes: Décès de l’écrivain originaire de Trinidad et  Prix Nobel de Littérature Vidiadhar Surajprasad Naipaul

Caraïbes: Décès de l’écrivain originaire de Trinidad et Prix Nobel de Littérature Vidiadhar Surajprasad Naipaul

© CNN

Vidiadhar Surajprasad Naipaul – peintre du déracinement, des petites gens et des empires déclinants – est l’auteur de plus de trente ouvrages dans lesquels se mélangent fictions, non-fictions et autobiographies.

« Il était un géant dans tout ce qu’il a accompli et il est mort entouré par ceux qu’il aimait, ayant vécu une vie pleine de créativité merveilleuse et d’initiative », a déclaré sa femme, Lady Naipaul, dans un communiqué.

Né le 17 août 1932 dans les Antilles britanniques, à Port of Spain, la capitale de la Trinité, d’une famille d’immigrés indiens, il avait étudié la littérature anglaise à l’université d’Oxford avant de s’établir en Angleterre en 1953. Il avait consacré une grande partie de sa vie à voyager et était devenu un symbole du déracinement dans la société contemporaine. En lui décernant le prix Nobel en 2001, l’Académie suédoise avait qualifié V.S. Naipaul d' »écrivain cosmopolite » et « tourmondiste littéraire ».

L’une de ses oeuvres majeures est son autobiographie « Une maison pour Monsieur Biswas » en 1964, où le héros emprunte les traits du père de l’écrivain.A travers ce livre, il décrivait la difficulté pour les immigrants indiens dans les Caraïbes de s’intégrer dans la société tout en conservant leurs racines. Le drame de Naipaul, l’Académie suédoise le résume ainsi: « La pauvreté culturelle et spirituelle de Trinidad l’afflige, l’Inde lui est devenue étrangère et il lui est impossible d’adhérer aux valeurs traditionnelles de l’ancienne puissance coloniale anglaise ».

Ses premiers travaux, consacrés aux Antilles, vont ensuite s’élargir au monde entier, Naipaul se concentrant essentiellement sur les traumatismes liés aux changements post-coloniaux. Condamné à chercher dans les valeurs universelles l’essence de l’être, et à travers elle sa propre identité, l’écrivain-philosophe visitera l’Inde, l’Afrique, les Amériques, les pays musulmans d’Asie.

Franc-parler

En 1998, il livrait « Jusqu’au bout de la foi », après avoir refait, apaisé, le voyage qui l’avait conduit, dix-sept ans auparavant, dans les quatre pays musulmans non arabes (Indonésie, Iran, Pakistan, Malaisie) qui avaient inspiré le fiévreux « Crépuscule sur l’Islam, voyage au pays des croyants » (1981). Il décrivait les pays post-coloniaux comme des sociétés « à moitié faites » et affirmait que la religion musulmane « force les gens à rejeter leur passé, et donc eux-mêmes ».

Titulaire de nombreux prix, dont le prestigieux Booker Prize (1971) britannique pour « Dis-moi qui tuer », il a été anobli par la reine en 1990. Il avait rencontré sa première épouse Pat, à Oxford, qui l’a soutenu sur sur le plan littéraire. Décédée en 1996, il a révélé plus tard avoir eu l’impression d’avoir précipité sa mort en reconnaissant publiquement avoir fréquenté des prostituées alors qu’elle luttait contre le cancer. L’année du décès de Pat, il avait épousé la journaliste pakistanaise Nadira Alvi.

Réputé pour son franc-parler, il était connu pour rompre facilement avec ses connaissances: « Ma vie est courte. Je ne peux pas écouter des banalités », disait-il. Son ire se manifestait à l’encontre de multiples sujets: de la corruption du pouvoir politique indien en passant par le comportement, cynique selon lui, de l’Occident envers ses anciennes colonies et le culte de la personnalité dans « Le retour d’Eva Peron » (1980). Il n’avait pas hésité à comparer l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair à un pirate à la tête d’une révolution socialiste et dénigrait les romancières qu’il qualifiait de « sentimentales ». « Les femmes écrivains sont différentes, elles sont très différentes. Quand je lis une partie d’une oeuvre, en un ou deux paragraphes, je sais si c’est écrit par une femme ou un homme. Je pense (que leur travail) n’est pas égal au mien », avait-t-il affirmé au quotidien anglais London Evening Standard.Selon lui, cela s’explique par « la sentimentalité » des femmes et leur « vision étroite du monde ».

Avec AFP