Avec son film « L’oiseau du Paradis », le réalisateur tahitien Paul Manate s’emploie à raconter un Tahiti intime et légendaire

Avec son film « L’oiseau du Paradis », le réalisateur tahitien Paul Manate s’emploie à raconter un Tahiti intime et légendaire

La captivante Blanche-Neige Huri, qui campe le rôle de Yasmina ©UFO Distribution

Le réalisateur tahitien vient de signer son premier long-métrage « L’oiseau du Paradis », dont la sortie est prévue le 15 avril prochain. Un film qui raconte un Tahiti intime et légendaire où le mystique, la légende et le romanesque se confondent pour former l’alchimie tahitienne. Action…

Depuis ses débuts de réalisateur, Paul Manate n’a de cesse de se pencher sur la richesse et la complexité de l’identité polynésienne. Dès son premier documentaire « Des pirogues et des hommes », réalisé en 1995 sur le club de Va’a de Faa’a et les courses du Heiva, il s’employait déjà à mettre en valeur son territoire et les hommes qui le composent.

Ce travail sociologique via l’art cinématographique s’est poursuivi avec « Ina », un court-métrage inspiré du personnage de sa demi-sœur kanak en 1998, puis avec « Mes quatre morts », tourné en 2008, qui raconte l’histoire d’un Tahitien qui débarque à Brest pour un stage. Plus récemment, c’est « Nevermore », réalisé à Tahiti sur le retour au fenua d’un légionnaire « demi » qui faisait l’objet de cette quête identitaire.

Un univers cinématographique nourri par son enfance

Il faut dire que l’univers cinématographique que ce « demi », métis pour les non-initiés, est nourri de son enfance passée à Tahiti et de sa mystique singulière, alimentant son imaginaire et puisant dans les paysages, les personnalités et la culture tahitienne, l’inspiration et la matière pour ses films à venir. « La Polynésie, par son exotisme évident, invite au risque et au romanesque », assure Paul Manate qui se plait à raconter qu’il a été bercé par un cinéma populaire dans son enfance et qu’il a eu sa révélation cinématographique dans l’équipe de basket alors qu’il était étudiant à Sciences-Po.

Après un DEA de cinéma à la Sorbonne et la création d’un Centre Européen de Formation à la Production de Films (CEFPF), celui qui a exercé presque tous les métiers du cinéma (régisseur, directeur de production, assistant-réalisateur, scripte ou machino), se mue en réalisateur, d’abord de portraits documentaires musicaux pour Paris Première et Arte, puis de courts-métrages de fiction.

« L’oiseau du Paradis », son premier long-métrage, dont la sortie est prévue le 15 avril prochain s’inscrit dans ce travail cinématographique. Ce film raconte l’histoire d’un jeune assistant parlementaire métis, amoral et séducteur, Teivi qui revoit un jour Yasmina, une lointaine cousine aux pouvoirs mystiques qui lui fait une étrange prédiction. Teivi, empêtré dans une affaire de corruption immobilière et en proie à des malaises hallucinatoires, est en train de perdre pied. Persuadé que Yasmina peut le guérir, il part à sa recherche et chemine jusqu’à la presqu’île fantasmagorique de Tahiti.

L’idée de ces deux héros opposés et liés par une prédiction magique est constitutive de son enfance et donc de Tahiti, de ses lieux, de ses hommes et femmes qui y vivent. « Ce sont deux archétypes forts et mythologiques – la Sorcière et le Prince – qui se cherchent et qui fuient », fait valoir Paul Manate qui ajoute, « c’est la confrontation de deux mondes, celui mystique et tellurique de Yasmina et celui corrompu et superficiel de Teivi ».

Une majorité d’acteurs non professionnels

Le réalisateur s’est inspiré d’une partie de ses souvenirs d’enfance. Yasmina est en effet une cousine aujourd’hui disparue avec qui il a grandi et avec laquelle il se sentait proche en dépit de leur différence d’âge, se souvenant notamment des contes polynésiens mystérieux, effrayants et souvent tragiques qu’elle se plaisait à lui raconter.

La légende de l’ogresse Hina racontée au début du film figure parmi ses souvenirs encore vivaces. « La véritable Yasmina n’avait pas de pouvoir mystique, mais j’ai aimé le croire, enfant, pour me construire mes propres mythes », se rappelle le réalisateur qui poursuit : « je suis parti du souvenir enfantin de cette drôle de relation entre fascination, affection et répulsion pour créer la Yasmina de fiction : une jeune fille à la fois soumise, puissante et intouchable ».

Un réalisateur qui a préféré faire appel à des acteurs non professionnels hormis pour le rôle de Teivi incarné par Sébastien Urzendowski et celui du député Gilot interprété par Patirick Descamps. Mais celle qui crève l’écran est bien Blanche-Neige – çà ne s’invente pas – Huri qui, par ses caractères naturels propres, « pleine et magnétique », selon les termes de Paul Manate, correspondent bien au personnage de Yasmina.

Au bout du compte, c’est à un conte mystique et contemporain dans un Tahiti légendaire, métis et vivant, c’est à presque un rite où souffle le « Mana » – l’esprit des ancêtres, la force supérieure de la Nature, bref l’énergie vitale puisée en chacun de nous – auquel nous convie Paul Manate avec « L’oiseau du Paradis ».

Une âme polynésienne qui sera encore présente dans son prochain film puisque déjà le réalisateur s’attelle à l’écriture d’un autre long-métrage qui se déroulera toujours à Tahiti. C’est l’histoire d’une ancienne miss de Tahiti qui quitte mari et enfants pour partir au bout de l’île avec un enfant malade à la recherche d’une plante médicinale censée le guérir. Encore et toujours l’âme polynésienne, immuable et supérieure.

En attendant, « L’oiseau de Paradis » sortira le 15 avril prochain et deviendra ainsi la première fiction cinématographique de Tahiti à sortir dans les salles obscures, jusque dans l’Hexagone.

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